L'art de collectionner


Une collection d'affiches naît comme n'importe quelle autre collection. On commence par trouver une pièce (souvent par hasard), qui devient ensuite la pierre angulaire de la collection. Il y a vingt ans, les affiches originales n'avaient pas le même statut qu¹aujourd'hui : on ne les considérait pas comme de véritables oeuvres d'art, dignes d'être collectionnées on pouvait souvent se les procurer pour quelques centaines de dollars. Aujourd'hui, leurs prix atteignent des sommets (le prix de plusieurs affiches a quadruplé en vingt ans!) ce qui contribue à nourrir l'intérêt grandissant que leur portent les collectionneurs. 

« Le véritable aficionado acquiert tout ce qui le stimule sur le plan esthétique, sans hésiter ni se demander si l'objet en question répond à un thème donné ou s'inscrit dans une école précise; et si ce collectionneur est parfaitement honnête et qu'il suit son instinct, ce qu'il amasse finira sans doute par répondre à des standards et à des valeurs qui lui sont propres. Et ultimement, sa collection sera unique, autonome et reflétera ses goûts et sa personnalité. » 

Les critères qui permettent de déterminer la valeur d'une affiche sont à la fois subjectifs et objectifs. Penchons-nous d'abord sur ce qui est insaisissable. Tout d¹abord que vous soyez un collectionneur amateur ou professionnel l'affiche doit vous séduire : évoquer une époque révolue, un moment que vous avez partagé ou auriez aimé partager, une image glanée dans l'oeuvre de Marcel Proust ou d'un autre auteur du début du siècle. Il y a généralement quelque chose, dans une affiche, qui vous donne envie de la posséder et de la placer sur votre mur. Selon A. M. Cassandre, un grand affichiste des années 20-30 : « L'affiche doit déclencher une émotion. Et cette émotion, que l'on en soit conscient ou pas, doit être de nature obsessive. »

          

Une fois que votre coeur a parlé, il est temps d'analyser l'affiche de façon rationnelle, en tenant en compte des facteurs suivants : État : les affiches n'ont pas été conçues pour durer plus de cent ans et la plupart d'entre elles sont imprimées sur du papier bon marché, ce qui les rend difficiles à préserver de génération en génération. Celles qui sont en parfait état (les professionnels les cotent A+) se vendent beaucoup plus cher que celles qui sont plissées, déchirées ou tachées (cotées de A- à D).

Artiste : comme dans n'importe quel art, ce sont les affichistes de renom (Toulouse Lautrec, Chéret, Mucha, Capiello) qui vont chercher les plus hauts prix. Certaines affiches sont considérées comme des raretés elles ont été imprimées en peu d'exemplaires ou les rares exemplaires en circulation appartiennent aux Musées ou à des collections privées et comme c'est toujours le cas lorsque l'offre ne répond pas à la demande, leurs prix montent.

Thème : les affiches ont annoncé toutes sortes d'événements, de destinations, de produits et de services. Récemment, les prix des affiches où apparaissait Bibendum (le bonhomme Michelin original) ont monté en flèche, excédant largement les estimations qui précédaient leurs enchères, alors que la valeur des autres affiches restait stable.

« L'histoire de l'affiche prouve que ce médium artistique a su s'adapter de façon étonnante à toutes sortes d¹esthétiques et d'usage... L'affiche occupe une position unique, à la croisée des Beaux-Arts et des Arts Appliqués, de l'artisanat et de la production de masse, de la culture, de la politique et du commerce. Les artistes, les architectes et les designers les plus visionnaires et les plus ambitieux de leur époque ne s'y sont pas trompés et ont su se servir de ce médium artistique pour sortir dans la rue, dépasser le cadre des salons et des musées et atteindre le monde qui les entourait. Encore aujourd'hui, l'affiche est au coeur de la vie culturelle, politique et commerciale. Dans ce qu'elle a de meilleur, elle a été et demeure un extraordinaire document social et artistique. »